THE OUTLAWS: Dixie Highway (2020)
01. Southern rock will never die
02. Heavenly blues
03. Dixie Highway
04. Overnight from Athens
05. Endless ride
06. Dark horse run
07. Rattlesnake road
08. Lonesome boy from Dixie
09. Showdown
10. Windy city’s blue
11. Macon memories
Henry Paul - guitars, vocals
Monte Yoho - drums, percussion
Dale Oliver - guitar, vocals
Randy Threet - bass, vocals
Dave Robbins - keyboards, vocals
Steve Grisham - guitar, vocals
Jaran Sorenson - drums, percussion
Pour cet album, avec Henry Paul, Monte Yoho, Dale Oliver, Randy Threet et Dave Robbins crédités, on peut se demander s’il s’agit bien d’un album des Outlaws ou de… Blackhawk ! Blackhawk, vous vous souvenez ? Le groupe, projet parallèle qu’on disait plus country du chanteur-guitariste Henry Paul. Mouais, ça a commencé plus country, et puis… Mais le projet fonctionne toujours et le groupe tourne gentiment. Manque plus que Chris Anderson, ex-Outlaws et ex-Blackhawk, comme invité ! Mais non, là c’est juste l’ami Billy Crain, ex-Outlaws et ex-Henry Paul Band qui vient en renfort. Ouf ! C’est qu’à la fin, ce n’est pas facile de s’y retrouver, dans tout ce micmac. Alors va pour les Outlaws, après tout, si la musique ne trahit pas l’esprit du groupe. Voyons tout ça à travers une écoute spontanée, titre à titre, réclamée par le rédacteur en chef.
Dès les premières notes, on comprend tout de suite là où le groupe veut en venir : Dale Oliver et Steve Grisham partent direct en harmonie, la rythmique pousse, la mélodie se met en place, une vraie mélodie qui peut se fredonner instantanément et qui réjouit les tympans. Le temps de se faire à cette magie retrouvée et les chœurs viennent appuyer le refrain avant que les soli en relais des deux fines lames précitées, tout aussi mélodiques, nous confirment que le gang a décidé de revenir à ses racines avec un son actualisé. Un petit break, histoire de, et ça repart : l’hommage aux confrères disparus, et à toute la confrérie à travers eux, est rendu de la plus belle des manières. On inverse l’ordre des solistes, rien que pour se faire plaisir et les deux se rejoignent dans une montée finale qui nous rappelle les plus belles heures du groupe : « Southern rock will never die », le premier single tiré de cet album a frappé, et frappé très fort. On lui souhaite d’être prophétique ! Et ça continue bien entendu dans le même esprit avec « Heavenly blues », échappé de « Hurry Sundown », le célèbre album de 1977, pour une relecture plus musclée, plus « produite » (les guitares acoustiques dans le fond du mixage) mais qui me semble aussi plus collective (guitares). Cela ne manque pas d’une certaine efficacité. On a pris soin de gommer toute influence de Hughie dans le son des guitares, qui paraît beaucoup moins frêle sans le son hors-phase très reconnaissable de la Strat’ du disparu. Une autre interprétation, et inévitablement une autre production, plus actuelle, mais qui ne dénature pas le morceau, après tout pourquoi pas ?
Plus hard dans le son, servi par un timbre de voix plus rauque, « Dixie Highway », une vieille connaissance pour ceux qui suivent le rock sudiste, met en évidence l’inventivité des duettistes du manche sur un rythme bien soutenu, à dévorer les miles pied à la planche, avec l’impatience du retour chez soi au mépris des empêcheurs de rouler en rond. La version actuelle a sa personnalité, et heureusement car déjà deux « reprises » (si on peut dire…) en trois titres, ça pourrait sentir le réchauffé. Superbe final guitaristique avant le sautillant et très countrysant « Overnight from Athens ». Son final, une galopade de guitare en harmonie, est tout simplement formidable. Cela fait tellement de bien d’entendre à nouveau ce son typique du rock sudiste, un peu négligé par les groupes un peu plus récents. « Endless ride » semble calmer le jeu avec son tempo de ballade, mais la slide s’envole vers les cieux, bien relayée par une consœur sans bottleneck, avant l’emballage qui clôt le morceau. Là le tempo prend un coup se sang, s’accélère d’un coup, et le duo infernal de tripoteurs reprend son petit relais à toi-à moi pour finir à deux en apothéose. Juste jouissif. Encore ! On en veut encore ! Changement d’atmosphère avec « Dark horse run », ballade country-rock vivement rythmée : les guitares acoustiques donnent le tempo, les chœurs impeccables enjolivent le refrain, on est parti à galoper gentiment dans les prairies quand un break soudain nous réveille avec un riff d’enfer, une guitare s’emballe, relayée pour la première et seule fois par l’orgue de Dave Robbins avant que la deuxième guitare s’envole au dessus de l’herbe… grasse et que le riff d’enfer ne fasse ré-atterrir tout le monde. Place à au boogie avec les syncopes de « Rattlesnake road » qui nous secoue sans mollesse, occasion d’une double partie de ping-pong acérée entre Dale et Steve. La basse ronfle, l’orgue mugit par derrière, les batteurs frappent sec, tout baigne… On peut enchaîner à nouveau sur du rock sudiste à l’ancienne: “Lonesome boy from Dixie”, morceau lui aussi déjà connu avec le Charlie Daniels Band puisque signé Tommy Crain (tiens tiens…) est issu de l’album Full Moon (1980 déjà...), mais toujours avec ce son actuel. Sa succession de breaks bien enchaînés nous amène dans un fauteuil au jeu complice des solistes qui se renvoient le médiator avec brio. Quel niveau sur cet album ! D’ailleurs le titre suivant, l’instrumental « Showdown » part sur une intro absolument étourdissante. Là encore, retour bienvenu d’une institution dans le rock sudiste et dans la tradition Outlaws. Un bon petit instrumental débridé avec un haut niveau technique, ça fait toujours plaisir. Quelque part planent aussi les esprits de « Both Sides » et des instrumentaux de l’ABB. Les fantômes sont de retour : une composition oubliée de Frank O’ Keefe ressort des limbes pour nous enchanter, avec un énorme travail rythmique, un gros son bien juteux et à nouveau ces infernaux duels de guitare et ces chœurs aériens : ça swingue à tous les étages, avec une incroyable énergie, un vrai tourbillon entraînant de haute volée. « Macon memories », morceau hommage, un de plus, de facture plus classique et plus countrysante, termine le boulot en relative douceur et en harmonie, avec des relents de l’ABB de Dickey Betts. Déjà fini ? Mais quel album, quel album !
Ce retour aux sources me fait de plus en plus penser à la réussite incontestable que fut « No guts... » pour le Molly Hatchet des années 80, un véritable miracle axé sur un retour à des fondamentaux réactualisés. Ici le miracle doit quand même pas mal à quatre titres déjà anciens et connus pour trois d’entre eux. C’est un des petits bémols que je mettrais à ce formidable album, avec un petit manque de slide et de piano martelé, Dave Robbins s’en tenant plutôt à l’orgue. Mais quel plaisir intense dispense l’écoute de cet album indispensable ! Un véritable petit joyau à écouter, réécouter…
Allez les gars, contrairement à Molly qui avait commencé à se perdre dans l’album suivant, refaites-nous un album de cette trempe, mais avec au moins dix titres originaux, et quelques interventions de plus à la slide. C’est possible ? Mais quel album quand même !
Y. Philippot-Degand
THE OUTLAWS Dixie Highway (2020)
La « guitar army » des Outlaws rentre dans la nouvelle décennie avec grand panache avec ce nouvel album "Dixie Highway" contenant onze titres, conduit de main de maître par les deux pionniers du groupe, Henry Paul/guitares, chant et Monte Yoho/batterie, assistés aux guitares par Steve Grisham, et, en remplacement de Chris Anderson, par le guitariste Dale Olivier du fameux groupe de Country-Rock Blackhawk fondé en 1992 par Henry Paul. Également venu de Blackhawk, débarque le bassiste Randy Threet, prenant le même chemin que le pianiste/claviériste Dave Robbins, actuel membre des Outlaws, avant lui, avec en complément dans cette nouvelle formation un deuxième batteur, Jaron Sorenson, puis en invité un revenant de : Billy Crain et sa faconde guitare. Que du bonheur nous apportent les Outlaws depuis 2012 avec l’étincelant "It's About Pride" et le double live Legacy, en 2016, avec des harmonies hautes en couleur aussi bien par la force des guitares que des voix en polyphonie ! On ne déroge pas à la règle sur ce "Dixie Highway" avec en ouverture "Southern Rock Willl Never Die", qui rend hommage à ceux qui ont bâti le « Southern Rock » et hélas partis dans le grand firmament. Suit "Heavenly Blues", composition de Henry Paul parue sur l'album "Hurry Sundown" de 1977, perle du Country-Rock avec atmosphère californienne à la Eagles. Puis arrive ce que l'on peut maintenant appeler un standard : le titre album "Dixie Highway" car enregistré déjà en 2004 par le groupe de Ron Keel, Iron Horse, où participait Henry Paul, et aussi sur le sélect "Brothers of the Southland" de 2008. Sur ce nouvel album, elle est sensiblement différente mais tout aussi chatoyante. Il faut le dire haut et fort : l'attribut majeur des Outlaws, avec son mélange « Southern Rock/Country Rock » lyrique et percutant, a toutes les qualités pour étonner les plus blasés, surtout avec des morceaux comme "Over Night From Athens", "Endless Ride", "Dark Horse Run", du bon Boogie avec le remuant "Rattlesnake Road", un hommage avec une compo de Tommy Crain, le frère de Billy, avec "Lonesome Boy From Dixie" provenant de l'album "Full Moon" du Charlie Daniels Band en 1980. Pour embellir le tout, ils nous font un instrumental d'anthologie avec "Showdown". Une bonne trouvaille avec "Windy City’s Blue", superbe composition « Southern blues » à l'allant Allman Bros datant de 1972, composée par Frank O'Keefe bassiste fondateur des Outlaws décédé en 1995. La leçon se termine en beauté par "Macon Memories" voyage initiatique où plane l'ombre des Allman Bros, du Marshall Tucker Band, du Charlie Daniels Band, des Outlaws, mis en musique avec une touche Dickey Betts : du très grand Outlaws, véritable madeleine de Proust. Le « Southern Rock » ne mourra jamais.
Jacques Dersigny
Cela fait toujours du bien d’avoir des nouvelles des Outlaws. C’est l’un des rares groupes sudistes historiques encore en activité et qui comporte deux membres fondateurs (le chanteur-guitariste Henry Paul et le batteur Monte Yoho). De nos jours, il ne reste plus grand monde d’authentique à part le bon vieux Charlie Daniels, Doug Gray et sa version abrégée du Marshall Tucker Band, Lynyrd Skynyrd et Eddie Stone avec son Doc Holliday allégé (les Pieds Noirs d’occasion ainsi que le pseudo combo à la hache sont nazes et tout juste bons pour participer à la Foire aux Fantoches).
De plus, un nouveau disque des Outlaws est toujours synonyme de qualité et de plaisir. Et puis cela faisait un bon moment que l’on n’avait plus entendu parler d’eux. Leur dernière manifestation discographique remontait quand même à 2016 avec leur double live. On savait Henry Paul bien occupé entre les concerts de son groupe d’origine, les shows avec sa formation country Blackhawk et la résurrection furtive du Henry Paul Band. Si la bande à Henry avait toujours du boulot, tant mieux. Mais on n’osait pas espérer un nouvel enregistrement studio, surtout avec la conjoncture musicale actuelle.
Et voilà qu’une nouveauté apparaît au grand jour et dans toute sa splendeur.
Sans exagérer, ce « Dixie Highway » est tout simplement excellent !
La superbe voix d’Henry Paul se mêle aux guitares affûtées et aux rythmiques familières héritées de la glorieuse époque des Outlaws. Le son est impeccable mais pas surproduit, et l’ensemble sonne résolument rock. Et puis le guitariste Billy Crain vient apporter son soutien avec sa géniale technique (il est en pays de connaissance puisqu’il a connu l’aventure du Henry Paul Band et a joué au sein des Outlaws).
Dès le début, on sait où on va avec le titre d’ouverture qui se dresse en profession de foi. Sur une rythmique rappelant 38 Special, « Southern rock will never die » rend hommage aux héros disparus du rock sudiste (Ronnie Van Zant, Steve Gaines, Toy et Tommy Caldwell, Duane et Gregg Allman, Berry Oakley, Taz Di Gregorio, Tommy Crain, Billy Jones, Hughie Thomasson et Frank O’ Keefe) avec des six-cordes qui pètent le feu.
Henry propose une nouvelle version honorable de « Heavenly blues » mais on note la suppression d’un accord mineur à la fin du refrain et le solo de guitare ne fait pas oublier l’original. On va dire qu’il s’agit d’un lifting.
Le titre rapide « Dixie highway » reste fidèle à l’esprit Outlaws avec des guitares jumelles. Cette chanson a une histoire. Composée par Henry Paul, elle a été enregistrée par le groupe Iron Horse (avec la participation d’Henry sur l’album « Bring it on »). Elle a aussi été reprise par le super groupe sudiste « Brothers of the Southland » (toujours avec la présence d’Henry).
Le country-rock mélodique « Over night from Athens » s’inscrit bien dans le style Henry Paul avec des guitares harmonisées.
La ballade mid tempo « Endless ride » s’avère efficace avec une slide sudiste et un final qui s’accélère pour un beau duel de guitaristes.
« Dark horse run » (une ballade rapide dans l’esprit Outlaws/Henry Paul Band) se termine en country speedé avec des guitares débridées. Par contre, on pouvait se passer du solo d’orgue (je me demanderai toujours ce qu’un clavier vient faire dans ce groupe).
« Rattlesnake road » (un country-rock sudiste bien enlevé) propose un beau dialogue de grattes tandis que « Lonesome boy from Dixie » (un country-rock rapide à la Outlaws) s’écoule sur un tapis de guitares en harmonie.
Sur un rythme un peu plus syncopé, l’instrumental country-rock « Showdown » nous présente un véritable festival de six-cordes.
Le gang d’Henry Paul nous fait une belle surprise avec une deuxième reprise, « Windy city’s blues » (composée par le défunt bassiste originel des Outlaws, Frank O’ Keefe, et dont la démo n’était disponible que sur des bootlegs). Après une intro diabolique, ce blues-rock en mode mineur s’étire sur un groove entêtant avant de s’achever en cavalcade de guitares.
La splendide ballade « Macon memories » clôture l’album. Il s’agit d’un hommage à cette ville, berceau du rock sudiste. Henry cite des noms qui ne nous sont pas inconnus comme Wet Willie, Charlie Daniels Band, Marshall Tucker Band ou la fameuse restauratrice Mama Louise. Et bien entendu, il évoque l’Allman Brothers Band : « In 69 the Allman Brothers came to town with a brand new southern sound » (« En 69 les frères Allman sont arrivés en ville avec un nouveau son sudiste »). Henry incorpore même plusieurs titres de chansons des Allman dans son texte (« Whipping post », « In memory of Elisabeth Reed », « Cross to bear »). Une conclusion grandiose !
Personnellement, j’ai été surpris. Je m’attendais à quelque chose de bien mais pas à ça. Des harmonisations de guitares, des rythmiques « southern country-rock », la voix inimitable d’Henry Paul. Tout ça m’a remué les tripes ! Le talent d’Henry et la guitare de Billy m’ont frappé de plein fouet.
J’avais tout juste fini d’écouter cet album que j’avais déjà envie de me le repasser, comme ça, pour le fun… et aussi pour le souvenir. Car je dois bien l’avouer, ce « Dixie Highway » m’a rappelé étrangement la grande époque des Outlaws et du Henry Paul Band. J’ai trouvé que c’était du bon travail. Même si par moments, il manquait quelque chose. Quelque chose que j’aurais souhaité entendre. Quelque chose de définitivement perdu. Ah, Hughie !
Bon, je ne vais pas laisser la mélancolie s’installer.
Voilà donc une nouveauté qui s’inscrit dans l’héritage de la musique du Sud et qui va secouer le petit monde du rock sudiste ! Du nouveau qui décoiffe !
Allez, j’ose une dernière question inspirée par le Diable. Vers quelle galaxie se propulserait ce disque avec les incroyables envolées de guitare du regretté Hughie Thomasson ?
Cette question restera malheureusement sans réponse.
Olivier « Ghost Rider » Aubry